Les critiques de Cathy M et godspeed
Des critiques de ce qu'on veut, faites comme on le veut... :)


21.9.03  

Sleep / Holiday, de Gorky’s Zygotic Mynci.



Well I used to be a dreamer
Now I don’t dream at all…


On avait quitté les Gorky’s Zygotic Mynci en en plein été 2001, sur une plage ensoleillée, leur guitare à la main et leur cœur débordant d’amour, débitant avec une facilité déconcertante des petites chansons pop rafraîchissantes, subtiles et luxuriantes sur le magnifique et émouvant How I Long To Feel That Summer In My Heart. Deux ans plus tard, les 5 gallois font moins les fiers et leur 8ème album, Sleep / Holiday, souffle plus la fin des vacances et des amourettes saisonnières que l’exubérance estivale, avec un net penchant vers la tristesse dépouillée des naufragés du sentiment amoureux. Si How I Long était un disque d’après-midi, Sleep / Holiday est lui plus un disque de fin de soirée…

Pourtant le début de l’album ferait presque diversion, mélange habituel chez eux de légèreté et de joie de vivre bucolique, avec un soupçon de mélancolie. Le premier titre, Waiting for Winter (quand je disais que c’était la fin de l’été…) reste du Gorky’s pur jus : instrumentation à dominante acoustique, une pincée de piano, un harmonica effréné, un tempo entraînant et donc un ravissement pour la tête et les oreilles. Le magnifique morceau suivant, Happiness, mené au piano, porte mal son titre, tant tout transpire chez lui d’une tristesse acceptée mais qu’on espère (que l’on sait ?) temporaire : le Bonheur ici, ce n’est pas l’état présent mais ce qui nous attend, pas si loin : "But Happiness will come our way / And magic comes, just not today…". Soit alors le titre le plus émouvant du disque. Pour se remettre d’aplomb suit l’excité Mow The Lawn, où les Gorky’s s’essayent au rock’n’roll débridé façon Roxy Music, ou comment péter les plombs alors qu’on voulait seulement "faucher la pelouse" (message personnel au groupe : ok les gars mais laissez un peu d’herbe pour qu’on puisse s’allonger, merci d’avance).

Arrive alors la première pause tempérée du disque, avec deux titres plus lents et calmes (mais qui ne laisse pas encore supposer de la fin anesthésiée de l’album) ; la nostalgie de Single To Fairwater et la douce simplicité rustique de Shorelight (l’une des deux chansons, avec Only Takes A Night, composées et chantées par le guitariste Richard James) ne sont certes pas des plus percutantes ou poignantes mais au moins les morceaux possèdent-ils une belle part de charme et de délicatesse. De plus, l’ambiance se réveille aussitôt avec l’utra-court (1min 40) Country qui porte bien son nom, un morceau décontracté plein de cette naïveté qui caractérise les textes du groupe ("Oh our love is a good / I will love you oh so long / So let’s go to the country / To a place where we both belong"). Avant la descente définitive, on se consolera avec le plus joli titre de l’album, un éclatant Eyes of Green, Green, Green, ode à la beauté des yeux de l’être aimé, cet éclat qui nourrit notre souvenir pendant son absence :

Kissed on the beach, and life’s alright
Years from now, she’ll share my name
And not meet up again, well would be a shame
Eyes of blue and eyes of green, green, green
Eyes are haunting me, oh in between…


Mais à partir de là, le dernier tiers de l’album ne sera plus qu’une lente (très lente) et lénifiante berceuse. Même pas geignarde ou misérabiliste, non, seulement une fastidieuse série de chansons pas vilaines pour la plupart mais pas très enthousiasmantes non plus, donnant la désagréable impression que le groupe lui-même est sur le point de s’endormir ; que ce soit la langueur douloureuse du violon de The South of France, la volupté du songe de Leave My Dreaming ou le final instrumental de Only Takes A Night, les jolis passages se succèdent mais ne transcendent pas, faisant néanmoins patienter avant le coup de grâce…
C’est en effet vers la fin que se montre le titre le plus déconcertant du disque, celui qui manque de peu de mettre toute l’entreprise par terre : Pretty As A Bee est un long morceau atmosphérique avec un orgue comme appui, peut-être une tentative hasardeuse (comme cette supposition) de traduire en musique une certaine vision de l’évanescence ; mais ce qui aurait pu être une idée intéressante devient relativement consternant étalé sur plus de 9 minutes ; des chœurs célestes et des cordes ont beau arriver à la fin du morceau, c’est trop tard, celui-ci est à peu près aussi passionnant à écouter que de regarder un escargot escalader un mur (ce qui peut être intéressant quand on a rien d’autre à faire, du genre isolé dans un coin perdu à la campagne, coupé du monde, sinon j’ai des doutes (à moins bien sûr d’être spécialisé dans l’étude comportementale du déplacement mural de l’escargot, fascinant sujet d’observation (travail espérons-le joliment rémunéré parce que, franchement, les escargots, on en a vu un, on en a vu mille))). Après une telle épreuve, c’est un peu injustement que le délicat Red Rocks, simple ballade au piano murmurée par Euros Childs, clôt l’album dans une certaine indifférence…

Et on a beau en faire le tour plusieurs fois, Sleep / Holiday n’arrive pas à convaincre totalement. Qu’il ne soit pas ce qu’on attendait n’est pas vraiment le plus gênant, ça ne l’empêche d’être relativement beau et touchant. Non, le problème est que ce dernier tiers exsangue est loin d’être attachant, non pas parce qu’il est mou du genou (qu’il aurait pu être joli) mais parce que peu inspiré (problème d’articulation peut-être ?). Cette tristesse affectée ne va pas bien au teint des Gorkys qui auparavant, même résignés, séduisaient plus que ça ; là on a l’impression que le chagrin leur a engourdi les doigts et la voix. On pourrait se demander longtemps pourquoi : déceptions amoureuses pour l’intégralité du groupe ? Envie d’apporter plus de maturité à leur musique ? Ce qui paraît peu probable pour un groupe vieux de plus de dix ans, à l’expérience et la ligne de conduite solide… A défaut de réponses ou d’explications qui n’existent sans doute pas, on se dira que ce n’est qu’un accident de parcours car si Sleep / Holiday est inégal et constitue une semi-déception, il a néanmoins ses bons moments, où tout ce qui fait le charme des Gorky’s rejaillit : cette facilité à créer de l’émotion, qu’elle soit rayonnante ou plus troublée. Alors gardons espoir, nul doute qu’à l’été prochain, les Gorky’s Zygotic Mynci auront retrouvé le sourire…

posted by godspeed | 19:07 |


15.9.03  

Take Them On, On Your Own, de Black Rebel Motorcycle Club



Born to be wiiiiiiiiilllllld…

Va-va-voum !!! Faîtes chauffer les moteurs, sortez les gants noirs et les blousons de cuir, que les plus frileux fassent de la place sur le bitume, Black Rebel Motorcycle Club est de retour ! 18 mois après un premier album des plus prometteurs, le trio originaire de San Francisco revient avec un second effort qui persévère dans la lignée d’un rock teigneux décapant les oreilles, avec un son plus imposant, des compositions plus travaillées, témoignant de la progression remarquable d’un groupe qui a pris du coffre, et confiance en lui.

Bêtement coincé dans la vague opportuniste du "renouveau du rock’n’roll" remis au (dé)goût du jour par les surestimés The Strokes et d’insipides suiveurs (on ne parle pas des White Stripes, bien évidemment), BRMC (du nom du gang de motards mené par Marlon Brando dans The Wild One/L’équipée Sauvage) méritait pourtant plus d’estime que ses camarades besogneux, avec ses hymnes rageurs et ses ballades planantes. Toujours produit par leur bon soin (rien n’est plus beau que de mettre les mains dans le cambouis), les 3 chenapans, blousons noirs, cheveux en bataille et l’œil cerné, reprennent les choses là où ils les avaient laissés, gardant toujours une ligne noisy, en durcissant un peu le ton, gardant cette ambiance sombre et fumeuse qui s’échappait des leurs chansons.
Tandis que les guitares vrombissent, entre accélérations enflammées et riffs ravageurs, et que Nick Jago percute ses fûts avec dextérité, Peter Hayes et Robert Turner se relayent au chant de leur morceaux embrasés. Dés le début, BRMC appuie sur le champignon, roule pied au plancher : les titres ardents et urgents (Stop, Six Barrel Shotgun) se succèdent à toute allure, l’énergie débridée qu’ils dégagent s’arrêtant à peine pour prendre en stop un enthousiasme quasi-pop (sur un exubérant We’re all in love). Plus loin, ce sera des plages plus apaisées que l’on traversera, dans des volutes psychédéliques ou fluctuantes, se prélassant dans un état second allant de l’apesanteur de In Like The Rose ou la volupté de Shade of Blue ; c’est une léthargie pas si éloignée que l’on retrouve sur le minimaliste et plaisant And I’m Aching, ou bien sur l’obsessionnel Ha Ha High Babe, à la rythmique captivante, dont l’unique phrase revient en boucle comme un leitmotiv ("You’re Ha ha high babe, you can’t keep it on the ground").

Certes, ils n’inventent rien. Oui, leur musique évoque souvent de vieux groupes à guitares furieuses des 30 dernières années, allant du punk-rock des Stooges au shoegazing à la Slowdive, du néo-psychédélisme de Spacemen 3 (et donc pas très loin non plus de certains morceaux de Spiritualized) au bruit blanc de Jesus & Mary Chain (ainsi que T-rex me souffle-t-on dans l’oreillette). Mais BRMC n’apparaît pas pour autant comme de vils copieurs, ils dégagent suffisamment de présence et de talent pour se faire leur place à part et montrer leur propre personnalité. Oui, ils cultivent un peu la pose mais pas à l’excès ; certains titres héritiers du MC5 (qui se prononce Primal Scream de nos jours) témoignent de leur observation engagée du monde qui les entoure, comme sur le morose Generation ("I’ve been feeling alone in this generation […] You put the knife in our back and no one even cares") ou le speedé US Governement ("I spit my faith to the city pavement, to keep a smile / I bought my legs from the US Governement to keep me in fine") qui finit comme une chanson de Blur période lo-fi (mais pas moyen de retrouver laquelle, désolé).

Vers la fin, le moteur se grippe un peu, et l’album accuse quelques longueurs malgré des chansons nerveuses et honorables comme l’aérien Suddenly, le rageur et inquiet Rise or Fall ("Mothers teach you to crawl, Fathers teach you to rise or fall / There’s no dream for us all, never see what you’re reaching for") ou le brut Going Under. Quant à l’épique final Heart+Soul, il a beau durer 7 minutes, c’est surtout son début qui marque, évoquant lors de ses premières notes le mythique Love Will Tear Us Apart de Joy Division…

Des réserves qui semblent minimes en bout de piste, tant l’écoute du disque aura provoqué des sensations intenses, comme sur une longue route cabossée et pleine d’embûches. Les chansons vigoureuses, honnêtes, directes, fonceuses de Black Rebel Motorcycle Club sont de toutes façon plus efficaces que tous les longs discours, retrouvant souvent l’énergie communicative et vibrante d’une musique rock qui a tendance à trop s’éparpiller."Whatever happened to my Rock’n’roll ?" demandaient-ils sur leur 1er album : il est sur la route, fonçant comme un dératé, se refaisant une santé et se portant plutôt bien, merci pour lui.

posted by godspeed | 13:53 |


11.9.03  

Sympathy For Mr. Vengeance, de Park Chan-Wook.

(Une fois n’est pas coutume, il est fortement déconseillé aux personnes qui comptent aller voir ce film de lire cette critique préalablement, de nombreux éléments décisifs du récit y étant dévoilés)

Plus d’un an déjà que ce Sympathy For Mr. Vengeance faisait le tour des festivals mondiaux en laissant derrière lui une traînée de spectateurs abasourdis (et d’autres passablement écœurés) par ce polar annoncé comme plus noir que noir, nihiliste et jusqu’au-boutiste dans sa description du mécanisme de la violence et de la vengeance. Mais même préparé au choc potentiel, la vision du film nous laisse tétanisé devant l’intransigeance d’un scénario inéluctable qui, au bout de deux heures, n’aboutira qu’à un constat pessimiste au possible sur la nature humaine et une société au bord du chaos et déshumanisée, figée dans un bain de sang dont la valeur rédemptrice ne sera que toute relative…

Le réalisateur, Park Chan-Wook, aura laissé mijoter son scénario plus de cinq ans avant de pouvoir le réaliser ; il aura fallu le succès surprise (record de recettes au box-office coréen en 2000) de son premier film paraît-il très réussi, Joint Security Area, pour lui permettre de trouver des investisseurs prenant le risque de produire un sujet si rebutant au premier abord. Au départ, le récit se concentre sur Ryu, jeune sourd-muet un rien naïf aux cheveux verts-bleus qui s’est promis de tout faire pour s’occuper de sa sœur, en attente urgente d’une greffe de rein. D’un groupe sanguin incompatible, il décide de contacter un réseau de trafiquants d’organes, qui lui dérobe toutes ses économies, ainsi qu’un de ses propres reins. Licencié économique de l’usine où il travaillait, sans le moindre sou alors qu’un rein est disponible pour sa sœur, sa petite amie activiste d’extrême gauche (tendance anarchiste), Young-Mi, le convainc de kidnapper la fille de son ex-patron, Dong-Jin, pour payer l’opération à l’aide de la rançon. La spirale du drame est alors déclenchée et la suite ne sera plus que morts tragiques et vengeances sanglantes…

Sympathy for Mr. Vengeance est un film qui agit un peu comme un nœud coulant, s’enroulant lentement mais sûrement autour de notre gorge puis serrant progressivement jusqu’à nous laisser sans souffle : lors de la première moitié du film, qui s’intéresse d’abord à Ryu et sa petite amie, Park filme minutieusement (synonyme de lentement ici) l’enchaînement chaotique qui entraînera tout ce petit monde dans une tragédie des plus désespérée (et désespérante). Plan-séquences (souvent fixes) qui travaillent la durée, quelques bidouillages sur la bande-sonore (puisque Ryu est sourd), la mise en scène pas nécessairement très originale mais inspirée de Park Chan Wook montre la progression en cascade, par étapes successives, vers le drame comme un évènement inéluctable mais aussi comme un acte presque légitime : si Ryu kidnappe (elliptiquement) Yu-Sun la fille de Dong-Jin, ce n’est aucunement par méchanceté ou perversité mais bien par nécessité de soigner sa sœur, et aussi poussé et forcé par une société qui rejette à la marge ses éléments gênants ou pauvres (c’est l’aspect critique sociale plutôt réussi du film, évoqué aussi dans un employé licencié qui tente un hara-kiri public avant de se suicider avec toute sa famille à défaut de pouvoir la nourrir, ou bien à travers le policier qui aide Dong-Jin, acceptant le pot-de-vin parce qu’il est dans la même situation que Ryu : pauvre, avec un proche à soigner…). Si le geste n’apparaît en rien excusable, il semble tout du moins compréhensible, ce qui fait que la suite n’en sera que plus tragique et les 2 morts successives du milieu du film (qui déclencheront les vengeances croisées de Ryu et Dong-Jin) sont d’autant plus saisissantes qu’elles paraissaient évitables (dans un monde plus juste). Mais on ne peut pas échapper à la fatalité…



La seconde partie du film, qui se traîne un peu, plus centrée sur Dong-Jin (impressionnant Song Kang-ho, à la présence indéniable) pose un peu problème : sa vengeance, en parallèle avec celle de Ryu contre les trafiquants d’organes, donne lieu à des scènes de meurtres assez proches d’exécutions sommaires et sanglantes dont le but apparaît alors des plus contestables : on est loin d’objets aussi abjects ou inutiles que 8 mm ou Irréversible mais le film vacille un peu sur ses fondations, la démonstration apparaissant un peu plus lourde, les coutures du scénario devenant plus visibles et schématiques (si, logiquement, les personnages ne semblent jamais avoir le choix ni l’opportunité de sortir de la fatalité, l’avalanche d’infortunes qui leur tombe dessus peut apparaître un peu forcée). Ces réserves n’empêchent pas de très bien voir où veut aller Park Chan-Wook, qui pousse son idée jusqu’au bout, avec intransigeance et sans compromis (à part peut-être un zeste d’humour noir burlesque des plus déstabilisants) et choisit de montrer la violence dans toute sa crudité pour en pointer l’absurdité et la vacuité, et observer la déshumanisation progressive des individus : celle de Dong-Jin par exemple, brisé et en pleurs lors de l’autopsie (difficilement supportable bien que complètement hors-champ) de sa fille puis baillant d’ennui et d’indifférence devant une suivante.

Reste que malgré cette perte apparente d’émotions, la culpabilité reste toujours là, en arrière-plan : lors d’une exécution par électrocution, Dong-Jin sera incapable de regarder sa victime, jetant une couverture sur elle. Puis face à sa dernière victime, couteau à la main, tremblant devant le geste à venir, il aura ses quelques mots, prononcés comme pour se rassurer lui-même de la légitimité de ses actes : "tu es un brave garçon, mais tu comprends pourquoi je dois te tuer…". Justification vaine car proche du dégoût de soi, et qui présentée ainsi fait que rarement vengeance(s) n’aura paru si justifiée et imméritée à la fois, et profondément pathétique; une foule de sentiments mêlés qui encore une fois donne une sorte d’explication mais pas d’excuses pour les actes commis au nom d’une vague réparation.
Puis une dernière sanction, une ultime vengeance à la logique absurde (apparaissant cette fois de façon plus gratuite parce que plus "extérieure" au drame) achève de donner la sensation de gâchis et d’une déliquescence absolue, celle d’un monde chaotique qui marche sur la tête, sans aucun repère moral ou idéologique, et socialement gangrené, où le cycle de la violence serait sans fin…

Plus qu’une nouvelle preuve de la brillante vitalité du cinéma sud-coréen (après, par exemple, les films de Kim Ki-Duk, qui peinent un peu à sortir chez nous, ou de Lee Chang-Dong, auteur du splendide Peppermint Candy), Sympathy…, malgré les réserves que l’on peut émettre sur sa seconde moitié, est avant tout un film d’une force impressionnante parce qu’intransigeant et direct, sans être complaisant, mais dont la noirceur donne des frissons glaçants. Malaisé plus que malsain, Sympathy For Mr. Vengeance perturbe aussi parce qu’il met en lumière ce que chacun d’entre nous ne voudrait voir mais que tout le monde partage : la part d’ombre de l’âme humaine, celle qui n’a besoin que d’un petit coup de pouce du destin pour céder à la dévastation de son prochain ou de soi, celle que l’on voudrait enterrer plutôt que de l’accepter dans tout ce qu’elle a de terrifiant.

I have no sympathy for you
You make me realise
The who I am…

posted by godspeed | 10:44 |
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